
Interviewer Nicolas Sirkis d'Indochine dans la même semaine où l'on apprend la disparition prématurée d'Alain Bashung m'a fait un drôle d'effet. Je n'ai pas l'intention d'y aller ici de comparaisons boiteuses entre les deux hommes ou leur œuvre. Sirkis le dit lui-même: «Il n'y avait aucune affinité musicale entre nous. Seulement un immense respect mutuel.»
Reste que les musiques de l'un comme de l'autre sont entrées dans ma vie sensiblement au même moment, au début des années 80, à un âge où les goûts se dessinent. Et je dois à Bashung comme à Sirkis d'être retourné à la musique francophone après un passage en sonorité sinon exclusivement du moins majoritairement anglo-saxonne. Pour Bashung, c'était Gaby, oh Gaby et l'album Pizza; Chez Sirkis, c'est bien sûr L'aventurier et le disque du même nom. D'un côté, un rock matiné de chanson française et de l'autre, une pop acidulé à la sauce new wave... En effet, peu de comparaisons possibles si ce n'est dans les teintes humoristiques inhérentes aux textes de ces deux chansons. Mais aussi, peut-être, parce que Bashung et Sirkis faisaient sonner le français différemment.
Par la suite, leurs routes musicales se sont encore davantage éloignées, chacun gagnant en maturité, mais aussi en intensité. Ils connurent leurs passages à vide et leurs heures de gloire mais leur route ne se croisèrent jamais. Et pourtant. Avec Nicola Sirkis au bout du fil alors que Bashung venait tout juste de quitter ce monde, je ne pouvais bien sûr éviter le sujet. Et voici ce que le leader d'Indochine avait à dire:
«Ça m'a profondément attristé. D'abord parce qu'il laisse dans le deuil sa petite fille de huit ans. C'est terrible parce que moi aussi j'ai une petite fille alors forcément, ça me renvoie à ma propre histoire. Et puis il faut savoir que sa principale assistante est aussi la mienne. Jeudi dernier (le 12 mars, ndlr), lorsque nous avons appris qu'il se devait d'annuler une nouvelle fois ses spectacles, nous lui avons envoyé un petit mot pour lui dire que nous pensions à lui et ça l'avait touché. Cela dit, je n'ai pas vraiment envie de faire partie de cette espèce de mascarade des hommages. Je me rappelle de Dutronc qui n'avait pas assisté aux funérailles de Gainsbourg.
Beaucoup lui en avaient fait le reproche. Mais il a eu raison. Il ne voulait pas sombrer dans le pathos. Moi non plus je n'y tiens pas. Tous les musiciens et les techniciens de Bashung ont travaillé avec nous. C'est vers eux que mes pensées se tournent. C'est eux que je veux réconforter. Vous savez, j'ai souvent été voir ses spectacles et c'est quelqu'un qui avait une aura extraordinaire. Mais au-delà de cela, c'était un être incroyablement gentil et humain, un des rares dans ce métier. Et ça, ce n'est pas de la frime.»
Vous aussi mon cher Sirkis...
Car c'est bien là la seule réelle comparaison que je peux tisser entre les deux hommes. Et elle demeure de l'ordre du personnel. L'un comme l'autre sont de ces artistes qui appartiennent à un club très select, celui des créateurs jouissant d'une notoriété énorme mais qui conservent leur deux pieds solidement ancrés sur terre. Croyez-en mon expérience de journaliste, ils sont rares ces artistes qui, lorsque vous les interviewez, se montrent si généreux de leur temps et de leur propos, si gentils, si ouverts. Ils ne sont vraiment pas légion ces créateurs consacrés qui ne répètent pas, blasés, le même disque d'un journaliste à l'autre; qui non seulement vous écoutent, mais qui réfléchissent avec vous et entrent en un véritable dialogue. Ils sont très peu... Mais chaque fois que je les croise, je me dis que je fais le plus beau métier du monde.
Malgré sa gloire, Bashung n'était pas dupe. Il savait toutes ces choses éphémères. Tout comme Sirkis d'ailleurs.
Que l'un repose en paix; longue vie à l'autre...
Reste que les musiques de l'un comme de l'autre sont entrées dans ma vie sensiblement au même moment, au début des années 80, à un âge où les goûts se dessinent. Et je dois à Bashung comme à Sirkis d'être retourné à la musique francophone après un passage en sonorité sinon exclusivement du moins majoritairement anglo-saxonne. Pour Bashung, c'était Gaby, oh Gaby et l'album Pizza; Chez Sirkis, c'est bien sûr L'aventurier et le disque du même nom. D'un côté, un rock matiné de chanson française et de l'autre, une pop acidulé à la sauce new wave... En effet, peu de comparaisons possibles si ce n'est dans les teintes humoristiques inhérentes aux textes de ces deux chansons. Mais aussi, peut-être, parce que Bashung et Sirkis faisaient sonner le français différemment.
Par la suite, leurs routes musicales se sont encore davantage éloignées, chacun gagnant en maturité, mais aussi en intensité. Ils connurent leurs passages à vide et leurs heures de gloire mais leur route ne se croisèrent jamais. Et pourtant. Avec Nicola Sirkis au bout du fil alors que Bashung venait tout juste de quitter ce monde, je ne pouvais bien sûr éviter le sujet. Et voici ce que le leader d'Indochine avait à dire:
«Ça m'a profondément attristé. D'abord parce qu'il laisse dans le deuil sa petite fille de huit ans. C'est terrible parce que moi aussi j'ai une petite fille alors forcément, ça me renvoie à ma propre histoire. Et puis il faut savoir que sa principale assistante est aussi la mienne. Jeudi dernier (le 12 mars, ndlr), lorsque nous avons appris qu'il se devait d'annuler une nouvelle fois ses spectacles, nous lui avons envoyé un petit mot pour lui dire que nous pensions à lui et ça l'avait touché. Cela dit, je n'ai pas vraiment envie de faire partie de cette espèce de mascarade des hommages. Je me rappelle de Dutronc qui n'avait pas assisté aux funérailles de Gainsbourg.
Beaucoup lui en avaient fait le reproche. Mais il a eu raison. Il ne voulait pas sombrer dans le pathos. Moi non plus je n'y tiens pas. Tous les musiciens et les techniciens de Bashung ont travaillé avec nous. C'est vers eux que mes pensées se tournent. C'est eux que je veux réconforter. Vous savez, j'ai souvent été voir ses spectacles et c'est quelqu'un qui avait une aura extraordinaire. Mais au-delà de cela, c'était un être incroyablement gentil et humain, un des rares dans ce métier. Et ça, ce n'est pas de la frime.»
Vous aussi mon cher Sirkis...
Car c'est bien là la seule réelle comparaison que je peux tisser entre les deux hommes. Et elle demeure de l'ordre du personnel. L'un comme l'autre sont de ces artistes qui appartiennent à un club très select, celui des créateurs jouissant d'une notoriété énorme mais qui conservent leur deux pieds solidement ancrés sur terre. Croyez-en mon expérience de journaliste, ils sont rares ces artistes qui, lorsque vous les interviewez, se montrent si généreux de leur temps et de leur propos, si gentils, si ouverts. Ils ne sont vraiment pas légion ces créateurs consacrés qui ne répètent pas, blasés, le même disque d'un journaliste à l'autre; qui non seulement vous écoutent, mais qui réfléchissent avec vous et entrent en un véritable dialogue. Ils sont très peu... Mais chaque fois que je les croise, je me dis que je fais le plus beau métier du monde.
Malgré sa gloire, Bashung n'était pas dupe. Il savait toutes ces choses éphémères. Tout comme Sirkis d'ailleurs.
Que l'un repose en paix; longue vie à l'autre...